Le gouvernement veut accélérer la rentabilité des radars auto
Les automobilistes ne vont plus être avertis de la présence de radars. De quoi accélérer la rentabilité d'un dispositif en souffrance.
L'an dernier, les radars automatiques (fixes + mobiles) ont flashé quelque 17 millions de fois.
Le verdict se voulait sans appel. "Le jackpot des radars automatiques touche ses limites", assénait-on après la publication du rapport d'Hervé Mariton, en novembre dernier, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011. Ce document annonçait la baisse du "montant annuel du produit des amendes forfaitaires issu du contrôle automatisé (...), à 435 millions d'euros contre 469 millions" en 2010. Une tendance bel et bien confirmée par les statistiques du contrôle automatisé des infractions routières, obtenues en exclusivité par Le Point.fr. En moyenne, le nombre d'infractions relevées annuellement par cabine est en effet tombé de 7 676 en 2008 à 6 340 en 2010, soit une baisse de près de 20 % en deux ans. Faut-il alors s'attendre à l'abandon des boîtes sur les bords de nos routes, comme dans certaines régions d'Angleterre et des États-Unis ? Pas du tout. Le gouvernement a plutôt opté pour un plan de relance qui a toutes les chances de fonctionner !
Car, la suppression des panneaux informant de la présence des cabines, annoncée mercredi par le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) va sans nul doute redonner un sacré coup d'accélérateur à la rentabilité du système, qui en avait bien besoin. Ces retraits vont aller "très vite, dans les prochains jours et les prochaines semaines", selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Pierre-Henry Brandet, interrogé ce dimanche par l'AFP. Un premier panneau a d'ores et déjà été enlevé dans le Doubs. À Paris, trois devaient disparaître lundi matin... Une diligence qui pourrait sonner comme une urgence ! Selon nos chiffres, la cabine la plus flasheuse, installée à Maxéville (Meurthe-et-Moselle) sur l'A31, a certes crépité 169 521 fois l'an dernier, soit plus de 465 flashes par jour ! Mais elle est
de la performance obtenue en 2008 par la plus vaillante des machines de l'époque, implantée aux Adrets de l'Esterel (Var), et qui avait pris plus 200 200 photos. C'est simple, les 20 radars fixes les plus actifs de 2010 se sont déclenchés 400 000 fois de moins que les plus dynamiques de 2008 (- 18%).
Ralentissement de la vitesse moyenne
Il semble bien que le coup de pouce gouvernemental était vital. Le "surplus de recettes du système des radars par rapport à ses coûts d'exploitation pourrait s'annuler dès 2017", si l'on en croit en effet un précédent rapport du député Mariton, paru en 2009. Tout ça, "en raison de la baisse des vitesses moyennes et de l'accidentalité", toujours insuffisante malgré tout pour décider l'interruption du déploiement des nouveaux automates. Selon les mesures de l'Observatoire national interministériel de sécurité routière (ONISR), les Français rouleraient en moyenne à 79 km/h, au lieu de 90 km/h en 2000. Or, selon ses calculs, "si tous les automobilistes respectaient les limitations de vitesse, la vitesse moyenne serait inférieure à 77 km/h". Autant dire qu'on y est presque...
De quoi donner de nouveaux arguments aux détracteurs des radars automatiques, qui accusent l'État de préférer remplir les caisses au lieu de se préoccuper réellement de la sécurité routière. Même les associations de familles de victimes de la route se sont dites mercredi "très déçues" par les mesures annoncées par le CISR, pronostiquant que "l'objectif de Nicolas Sarkozy d'avoir moins de 3 000 morts sur les routes en 2012 ne sera pas atteint".
Déchets
Sans cette annonce et celle de l'interdiction des avertisseurs de radars, la marge de progression de l'efficacité du système est tout de même importante puisque les déchets sont encore très nombreux. Au total, l'an dernier, les radars automatiques (fixes + mobiles) ont flashé quelque 17 millions de fois, dont plus de 15 millions étaient des véhicules en excès de moins de 20km/h par rapport à la vitesse autorisée, selon les chiffres transmis par le ministère de l'Intérieur et les préfectures. Sur la totalité de ces messages d'infraction, seulement 9 millions d'avis de contravention ont été envoyés par la Poste aux titulaires des cartes grises.
Le reste s'est révélé inexploitable, car il s'agissait "d'étrangers, de motos photographiées par l'avant [ndlr : sans la plaque d'immatriculation fixée à l'arrière], de photos floues ou avec la présence de plusieurs véhicules", explique l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ex-DPICA). On est
de l'objectif fixé, c'est-à-dire du ratio de 66 % ! Et encore, par rapport aux dispositifs feux rouges, la performance ne paraît pas si médiocre que cela. Sur les 756 552 flashes enregistrés l'an dernier aux intersections contrôlées, moins de 290 000 ont été transformés en PV, soit un ratio de 38 %... Que les automobilistes se le disent, les radars automatiques ont vraisemblablement encore de beaux jours devant eux.